Culture : un centre de recherche sur l’art contemporain bientôt en construction dans la résidence de Maître Alfred Liyolo

La résidence de l’artiste plasticien défunt Alfred Liyolo, située dans la commune de Mont-Ngafula à Kinshasa, va bientôt être transformée en premier musée privé d’art contemporain congolais. C’est ce qu’a annoncé la Fondation Alfred Liyolo lors d’une journée commémorative organisée le 13 avril dernier pour le cinquième anniversaire du décès du célèbre sculpteur.

Myoto Liyolo, directrice de la Fondation éponyme, a annoncé ce projet de transformer la résidence en musée dédié à l’art congolais. Ce sera le premier du genre en RDC alors que ce courant artistique a fortement influencé l’Afrique centrale. L’objectif sera de promouvoir l’œuvre d’Alfred Liyolo mais aussi de faire de ce lieu un centre de recherche et de formation sur l’art congolais contemporain. Les travaux débuteront d’ici fin 2024 avec le soutien de l’Agence Française de Développement.

« Cette maison a vocation à devenir un centre de formation et de recherche sur l’art congolais, conformément à la volonté de Maître Liyolo et de son épouse », a déclaré Myoto Liyolo, directrice de la Fondation. Il s’agira du premier musée privé du genre en RDC, alors que l’art congolais a grandement influencé les autres arts d’Afrique centrale.

« Ce type de centre n’existe pas au Congo, sauf erreur. Et pourtant, l’art plastique a beaucoup influé sur le reste de l’art en Afrique centrale. Mais c’est dommage qu’on n’ait pas de centre de recherche sur l’art contemporain congolais et qu’on ait oublié ceux qui ont fait la grandeur de l’art plastique dans ce pays.Nous n’avons pas assez d’espace qui permet à la jeunesse d’aujourd’hui d’apprendre de son histoire, raison pour laquelle, ce musée va permettre à la communauté de comprendre non seulement qui était Liyolo mais ses contemporains et d’assurer la tradition, c’est-à-dire, la transmission aux futures générations », a-t-elle expliqué.

Les travaux de réhabilitation démarreront d’ici fin 2024, avec le soutien de l’AFD. Ce bâtiment qui sera coiffé d’un totem de Liyolo sera visible à partir de l’UPN.

Par ailleurs, Mme Liyolo a plaidé pour un soutien accru envers les artistes congolais, jugeant la culture comme un pilier du développement durable du pays. Elle a appelé le secteur privé et les institutions à se mobiliser davantage derrière ces acteurs culturels, que ce soit via des subventions ou l’ouverture de réseaux professionnels. Le combat d’Alfred Liyolo pour la reconnaissance de l’art congolais reste d’une brûlante actualité, cinq ans après sa disparition. Avec ce futur musée, sa fondation entend perpétuer son héritage artistique.

Plusieurs témoignages ont été partagés, dont celui de son ami et collègue le Professeur André Yoka, pour retracer le parcours et la personnalité hors du commun de Maître Liyolo. Reconnu comme l’un des plus grands maîtres du bronze en Afrique, le défunt artiste a su véhiculer dans ses œuvres un message humaniste célébrant les figures anonymes du peuple congolais. Ses statues emblématiques représentant « la femme marâchère » ou « le militant du MPR » rendent hommage aux laissés-pour-compte de l’histoire.

Découvertes du sanctuaire du grand Maître Bronze

Dans le cadre justement de cette journée, les participants ont eu l’occasion de visiter l’atelier de l’artiste, un lieu empreint de créativité et de génie. Les sculptures majestueuses exposées témoignaient du talent inégalé d’Alfred Liyolo et de sa capacité à donner vie au bronze et autres matériaux. Cette visite guidée a permis aux visiteurs de plonger dans l’univers artistique de l’artiste et de ressentir l’énergie qui émanait de ses créations.

Dès l’entrée, les visiteurs sont accueillis par une exposition mettant en valeur les œuvres les plus emblématiques de l’artiste. Des sculptures majestueuses, des formes abstraites et des compositions originales qui rendent témoignage de la créativité et de la maîtrise de l’artiste.

Des écoliers invités

Les écolières d’un établissement d’enseignement primaire de la place étaient également invités à cette messe culturelle. À cet effet, ils étaient articulièrement enthousiastes à l’idée de découvrir l’atelier d’un artiste renommé. Guidé par madame Miyoto coordonnatrice de la fondation Liyolo , ils ont pu observer de près les différentes étapes de création d’une sculpture. Du modelage de l’argile à la réalisation finale en bronze, chaque détail du processus de création leur a été expliqué avec passion. Les jeunes visiteurs ont également eu l’opportunité de poser des questions à la guide, qui s’est volontiers prêté au jeu en partageant son expérience.

Des artistes de l’académie des beaux-arts aussi

Les artistes en herbe présents lors de cette journée ont été inspirés par la visite de l’atelier d’Alfred Liyolo. Ils ont pu se plonger dans l’univers de la sculpture et découvrir de nouvelles techniques et approches artistiques. Certains ont même eu la chance de recevoir des conseils personnalisés de la part de l’artiste renommé, une expérience inoubliable pour ces jeunes talents en devenir.
Au-delà de l’aspect artistique, cette journée portes ouvertes a également été l’occasion de sensibiliser le public à l’importance de l’art dans notre société.

Projection d’un film documentaire

Dans le lot de cette activité, un film documentaire était présenté au public, retraçant avec émotion le déroulement de ses obsèques qui avaient réuni une foule immense.

Grâce à des images d’archives et des témoignages inédits, le documentaire a permis de replonger dans l’atmosphère chargée en émotions de ce dernier hommage. On y voyait à nouveau la famille de l’artiste, effondrée par la douleur, assister à la cérémonie religieuse. Ses enfants sont notamment revenus sur ce moment très difficile à vivre.

La caméra suivait ensuite le cercueil jusqu’à sa dernière demeure sur les notes des chansons religieuses catholiques. Des fans en larmes témoignent de l’importance qu’avait eu Maitre Liyolo dans leur vie. Ce document poignant a montré que cinq ans après, le maître de bronze reste dans tous les cœurs. Un artiste inoubliable dont l’héritage musical perdure.

Cinq ans après sa disparition, Alfred Liyolo demeure une figure emblématique de l’art congolais. Considéré comme un maître de la sculpture, il a laissé une empreinte indélébile sur la scène artistique de son pays et au-delà. Son talent exceptionnel et son audace ont propulsé la sculpture congolaise sur la scène internationale.
Né en 1938 à Bolobo est une localité, chef-lieu du territoire éponyme de la province du Mai-Ndombe, Alfred Liyolo s’est formé en République démocratique du Congo avant de poursuivre ses études en Autriche, où il a obtenu un diplôme de sculpture monumentale. Cette double influence, combinant les traditions artistiques africaines et les formes modernes occidentales, se reflète dans ses œuvres.

Dans les années 1960, Alfred Liyolo a joué un rôle de pionnier en osant des styles audacieux. Il a ouvert la voie à de nombreux artistes congolais en repoussant les limites de la créativité. Grâce à son talent, la sculpture congolaise a acquis une renommée internationale. Ses expositions à travers le monde et ses activités d’enseignement ont contribué à la diffusion de son art unique.

Alfred Liyolo était un maître dans l’art du bronze. Ses sculptures réalisées dans ce matériau noble sont devenues des œuvres marquantes. « La Penseuse », créée en 1976, est l’une de ses compositions les plus célèbres. Il a également réalisé des monuments emblématiques, tels que celui rendant hommage aux mamans maraîchères à Kinshasa et le monument à Franco Luambo Makiadi. Ces sculptures monumentales ornent les espaces publics de la RDC, témoignant de l’impact durable de son travail.

Depuis sa disparition en 2019, la mémoire d’Alfred Liyolo est honorée à travers divers hommages. Les expositions récentes, telles que « Liyolo Empreinte » et « Là où règne le culte de la création », témoignent de l’importance continue de son œuvre. En novembre dernier, une pierre tombale magnifiant son travail a été dévoilée sur sa sépulture. Son héritage artistique reste vivant et continue d’inspirer les nouvelles générations d’artistes congolais.

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Christian Mampuya
Journaliste chez Mbote.cd

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