Le silence s’est installé dans les cercles universitaires du monde entier. Le Professeur Valentin-Yves Mudimbe, philosophe congolais, auteur majeur des études postcoloniales et esprit libre de la pensée critique africaine, est décédé ce mardi aux États-Unis, à l’âge de 84 ans.
Plus qu’un intellectuel, Mudimbe était une boussole pour des générations de chercheurs africains et occidentaux. Formé à l’université Lovanium de Kinshasa, puis à Louvain, il avait abandonné très jeune la vie monastique pour se consacrer à la connaissance, traquant sans relâche les fondements idéologiques du savoir sur l’Afrique.
Son œuvre, dense et exigeante, comprend des romans, des essais et des poèmes. Dans L’Invention de l’Afrique (1988), son livre le plus célèbre, il questionne les constructions idéologiques de l’altérité et remet en cause les catégories par lesquelles l’Occident a longtemps défini le continent africain. Il y développe une critique radicale des représentations coloniales et postcoloniales de l’Afrique, tout en affirmant la nécessité d’un regard africain, lucide et émancipé.
Contraint à l’exil en 1980, Mudimbe a poursuivi sa carrière aux États-Unis, enseignant dans plusieurs grandes universités, notamment Duke, Stanford et Haverford College. Là-bas, il a influencé de nombreux chercheurs à travers le monde, sans jamais cesser de dialoguer avec son pays d’origine, la République Démocratique du Congo, dont il a porté les espoirs, les contradictions et les douleurs.
